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Tintin et le trésor du droit


Les aventures de Tintin et Milou ne seraient-elles qu’une simple distraction de juriste ? Le constat s’impose : il est certain que Tintin – inventé par George Remi, dit Hergé – peut servir de guide pour la pensée juridique.


La justice peut-elle être prédictive ?

Les aventures de Tintin et Milou ne seraient-elles qu’une simple distraction de juriste ? Prenez un album de Tintin au hasard dans votre bibliothèque, effleurez le papier et laissez le droit irriguer votre esprit. Le constat s’impose : il est certain que Tintin – inventé par George Remi, dit Hergé – peut servir de guide pour la pensée juridique.


Jeune reporter pour le Vingtième Siècle, les aventures de Tintin le mènent aux quatre coins du monde, dans des pays réels ou imaginaires, où de multiples rebondissements le mettent généralement par pur hasard en présence de malfrats ou même de génies du mal, dont son courage et son ingéniosité lui permettent de déjouer les complots et de les combattre victorieusement. Certes, Hergé ne fut point juriste – malgré quelques démêlés avec la justice à la Libération – mais par son action inconsciente, ce dernier a participé silencieusement à l’existence du droit. Au travers d’une petite lorgnette juridique, il nous invite à regarder, avec passion et curiosité, son œuvre pour mieux réfléchir à notre propre perception du droit, à son histoire et ses enjeux.


Il est vrai que derrière la surface dessinée, Tintin s’est attaqué, de façon plus ou moins discrète à maint comportement antilibéral ou hostile aux droits de l’homme : lutte contre les préjugés ethniques (Le Lotus Bleu), la présomption de vol (Les Bijoux de la Castafiore), la lutte contre la criminalité sous toutes ses formes (Les Cigares du Pharaon, Le Crabe aux pinces d’or, L’île Noire, L’Étoile mystérieuse), la lutte contre l’esclavage et le trafic d’êtres humains (Coke en stock). Aussi, Hergé n’est pas qu’un conteur d’histoires, il est aussi un éveilleur de consciences et un défenseur des droits fondamentaux. Il faut la sagacité de Tintin pour découvrir la vérité, sans céder à la présomption… de culpabilité : pas de justice expéditive « au napalm, à la roquette, à la bombe » (Tintin et les Picaros). Ainsi que le résume le capitaine Haddock : « Quand on accuse quelqu’un, il faut des preuves » (Le secret de la Licorne).


Surtout, Tintin se présente comme le chantre de la monarchie constitutionnelle (Le Sceptre d’Ottokar) même si, en réalité, il annonce le nouveau visage de la Belgique après la « question royale ». Faut-il rappeler l’analyse imaginative consacrée aux dispositions de la Constitution syldave afin de savoir si son Conseil supérieur était une « cour constitutionnelle »[1] ? Peut-être faut-il alors accepter l’idée qu’aux yeux de Tintin, la loi est l’œuvre d’une autorité parlementaire élue dans des conditions régulières : la loi, « c’est la loi […]. Il faut [lui] obéir » (Le Temple du Soleil). Tintin apparaît donc comme une incarnation de l’ordre dans la mesure où il déploie une énergie considérable aux fins de le préserver ou de le restaurer. Il entend aussi le respecter dans ses activités les plus quotidiennes comme lorsqu’il dit : « Je déclare toujours tout à la douane » (Les bijoux de la Castafiore) ! Et que penser de la célèbre expression des Dupont-Dupond, « Au nom de la Loi », dont l’efficacité, somme toute relative, n’est pas sans révéler une critique acerbe à l’encontre de ceux qui édictent des normes générales et abstraites[2].


Tintin n’est pas non plus sans interroger le droit du travail, le droit spatial ou encore le droit d’auteur puisque la société belge Moulinsart, créée en 1996, qui gère l’exploitation commerciale de l’œuvre d’Hergé n’hésite pas à poursuivre toute personne utilisant sans autorisation les personnages d’Hergé. Cette attitude « pointilleuse » est vivement critiquée par la communauté tintinophile – mentionnons ici l’existence de l’association des Tintinophiles du Palais ! Pour autant, ce résultat n’est que la stricte application de la loi[3] : encore récemment, l’artiste Peppone a été condamné pour contrefaçon sur ses bustes et fusées issus de l’univers d’Hergé[4], tandis que l’utilisation du personnage de Tintin dans des peintures inspirées des œuvres d’Edward Hopper relevait de l’exception de parodie[5].


La rigueur juridique n’est liée ni à l’âge, ni à la tristesse ou au sérieux. La curiosité et l’humour peuvent constituer de véritables vecteurs permettant au droit de progresser et aux juristes de s’y passionner un peu plus. C’est pourquoi Tintin constitue peut-être l’une des plus belles incarnations de notre « trésor du droit » car, au-delà de sa dimension ludique, la bande dessinée en général, et Tintin en particulier, incarne une autre perception des réalités sociales pour les juristes de 7 à 77 ans !


[1] O. Jouanjan, « Sur quelques aspects d’un vaste débat : le Conseil supérieur de la Constitution syldave est-il une “cour constitutionnelle” ? », in Mélanges M. Troper, Economica, 2006, p. 551.

[2] F. Delpérée, « La Constitution de Tintin », RFDC, 2014, n° 4, p. 879.

[3] D. Bélot, « Droit d’auteur : la stratégie Tintin », Juris art etc., 2014, n°17, p. 37.

[4] TJ Marseille, 17 juin 2021, n° 19/03947.

[5] TJ Rennes, 10 mai 2021, n° 17/04478.



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« Faire son droit », c’est apprendre à trouver la justice en raisonnant avec rectitude et rigueur par le droit. Un juriste est un esprit libre et non-conformiste, ce qui lui permet de progresser vers plus d’humanité, de sagesse et de prudence.

Pour cela, et à la différence de l’université, COURS PRUDENCIA – ÉCOLE DE DROIT TOULOUSE te guide et t’accompagne afin de développer ton esprit critique et renforcer ta culture générale et juridique !

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